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Point sur l'immobilier

Résumé de l'article

"Les performances passées ne préjugent pas des performances futures" : cette phrase de l'AMF peut également s'appliquer sur le soi-disant "investissement préféré des français".


La réassurance du bon vieux temps

Il est courant de croire que l'immobilier est un investissement sûr en raison de sa tangibilité et de son utilité, sachant que les individus auront toujours besoin d'un logement. On ne peut pas leur donner tort lorsque l'on regarde les données historiques sur la variation des prix des logements publiées par l'INSEE au quatrième trimestre 2022 :

Depuis 2016, nous avons observé une hausse continue des prix de l'immobilier, qui s'est maintenue jusqu'à la fin de l'année 2022. Cependant, cette tendance pourrait s'arrêter en 2023 en raison d'un changement d'environnement économique.



Changement de paradigme ?

L'augmentation de l'inflation a poussé la Banque Centrale Européenne (BCE) à relever son taux directeur, mettant fin à l'ère de l'argent bon marché. Cette décision a des conséquences directes sur l'économie réelle : les entreprises auront plus de difficultés à obtenir des financements pour de nouveaux projets, car une plus grande partie des bénéfices sera consacrée au remboursement de la dette, plutôt qu'à être réinvestie ou distribuée sous forme de dividendes ou de salaires. Auparavant, avec des taux d'intérêt proches de zéro, n'importe quel projet offrant un rendement de 1% ou même 0,05% trouvait des investisseurs. Cela a ainsi entraîné une prolifération de nombreuses start-ups proposant des services tels que la promenade de chiens ou la livraison à domicile de légumes exotiques biologiques, avec des promesses mirifiques de sauvegarde de l'environnement.


Actuellement, nous observons une diminution des volumes de transactions immobilières, avec une baisse de 14,1% au premier trimestre 2023, bien que les prix se maintiennent plus ou moins. Les délais de vente s'allongent et le stock de biens disponibles à la vente augmente. Les vendeurs adoptent une attitude d'attente, espérant un éventuel changement de tendance sur le marché. De leur côté, les acheteurs anticipent des prix plus bas à l'avenir, ce qui les incite également à patienter. Cependant, dans les régions où les prix ont atteint des niveaux record, notamment à Paris, et en général là où les vendeurs sont lourdement endettés, ils ne peuvent plus se permettre d'attendre en raison de leurs obligations de remboursement de dettes. Ainsi, ils commencent à baisser les prix pour réaliser des transactions plus rapidement, ce qui a entraîné une baisse de 6,1% sur les prix de vente dans certains cas.


Fin des crédits faciles

Ce phénomène est en partie lié au fait que les banques ont resserré leurs critères de crédit et exigent un apport personnel plus important lors d'un achat immobilier. Ces mesures ont déjà des répercussions sur le marché, comme en témoignent les dernières données de la Banque de France qui indiquent un ralentissement de la croissance du montant des prêts immobiliers accordés.

Volume de création de crédits

On constate une baisse de volume de création de crédits immobiliers bien en dessous de la moyenne constatée entre 2015 et 2022. Taux de croissance annuel des encours de crédit à l'habitat :

Le taux de croissance annuel des encours de crédit à l'habitat connaît une nette diminution.

Emploi et revenu des ménages

Au sujet de l'emploi et du revenu des ménages, malgré un rapport encourageant en Mai 2023 sur le taux de chômage, l'INSEE reste pessimiste quant à son évolution dans les mois à venir. Mais regardons l'évolution des salaires et celle des prix rapportée par l'INSEE.

Entre 2015 et 2020, le salaire net moyen a augmenté de 7,23%, tandis que les prix ont connu une hausse de 14,85%. Cette situation a entraîné une stagnation du pouvoir d'achat global pour les individus, ce qui signifie que l'augmentation des prix immobiliers au cours de cette période s'explique moins par une augmentation des salaires que par les taux d'intérêt très bas dans le secteur de l'immobilier.


Illustration

Maintenant, faisons l'exercice pour évaluer la capacité d'emprunt des ménages en fonction des taux d'intérêt pratiqués. Imaginons un ménage dont chaque partenaire gagne le salaire mensuel net moyen calculé par l'INSEE et souhaite emprunter sur 25 ans pour acheter un bien immobilier. Comparons l'évolution de leur capacité d'emprunt entre 2021 et 2023.

Salaire mensuel net de référence (INSEE)

2 520 €

Salaire mensuel net d'un ménage

5 040 €

Capacité de remboursement mensuel (35% des revenus du ménage)

1 764 €

Capacité d'emprunt si :

Taux d'intérêt 2021 : 1,3% (*)

425 798 € (*)

Taux d'intérêt 2023 : 4% (*)

315 097 € (*)

Différence

- 110 701 €

(*) Sources :

https://toutvabiens.com/credit-immobilier-quels-taux-en-ce-debut-dannee-2021/

https://www.empruntis.com/financement/actualites/barometre-national.php

https://www.hellopret.fr/capacite-demprunt/


Dans cet exemple, on constate une érosion de la capacité d'emprunt moyen des ménages de plus de 110 000 €. Cela soulève la forte probabilité que les prix des biens immobiliers vont s'ajuster en conséquence.



Et les banques dans tous ça ?

Un dernier point important concerne l'acteur principal qui a favorisé la prolifération des crédits immobiliers : les banques. Durant les périodes fastes, elles ont été très agressives, car la compétition les poussait à réaliser des volumes d'affaires élevés. Cependant, elles sont bien conscientes du phénomène qui se déroule sur le marché immobilier et s'adaptent en conséquence. Cela crée un effet de prophétie auto-réalisatrice : elles anticipent une baisse des prix en raison du crédit plus cher, et en réaction, elles durcissent leurs conditions d'emprunt en exigeant un apport personnel plus important et un taux d'endettement moins élevé, ce qui contribue à alimenter la baisse des prix.


Une nouvelle amusante en provenance du Royaume-Uni, qui représente le pire cauchemar des banquiers : les organismes de crédits immobiliers britanniques prévoient une augmentation des défauts de paiement sur les emprunts au 3ème trimestre. Les propriétaires sont confrontés à deux problèmes majeurs : certains ne parviennent plus à faire face aux échéances en raison de pertes d'emplois ou d'une hausse des dépenses qui ne sont pas compensées par les revenus. D'autres réalisent qu'ils doivent rembourser aux banques plus d'argent que ce que la valeur de leurs biens pourrait atteindre sur le marché.

Exemple

En France, l'apport moyen d'un ménage âgé de 30 à 39 ans était de 65 000 € en 2022. Supposons qu'ils souhaitent acheter un appartement de 40 m² à Paris, pour un budget d'environ 400 000 €. Une baisse d'environ 15% du prix pourrait rendre l'opération non-rentable, car la somme due à la banque serait supérieure à la valeur du bien sur le marché. Pour ceux qui ont acheté en 2019, l'apport moyen demandé était de seulement 44 000 €, ce qui signifie qu'une baisse de 10% pourrait déclencher un appel de marge ! Comme la plupart des propriétaires sont endettés, cela pourrait entraîner une course brutale et chaotique vers la sortie. Ce phénomène est similaire à ce que l'on observe dans les marchés boursiers lors des krachs : tout le monde cherche à vendre car ils doivent tous rembourser quelqu'un quelque part et a besoin de cash partout où il se trouve.


La capacité des banques à prêter de l'argent aux ménages (et à tous les acteurs économiques en général) est de plus en plus érodée par la politique monétaire de la Banque Centrale Européenne (BCE). Les régulateurs imposent aux banques européennes d'investir leur excédent de liquidités dans des obligations d'État. Cependant, bon nombre de ces obligations ont été achetées pendant la période de taux d'intérêt bas. Avec la hausse des taux, ces obligations ont une valeur de marché inférieure à celle à l'achat. Cette situation rend difficile pour les banques d'émettre des nouveaux prêts vers l'économie réelle, car elles doivent conserver du capital pour combler les pertes potentielles liées à ces obligations.

Exemple

Pour comprendre pourquoi les banques françaises (et potentiellement celles de la zone euro) sont assises sur des pertes monumentales, prenons l'exemple d'une banque qui a investi ses excédents de liquidités dans une obligation assimilable du Trésor français à 10 ans (OAT 10 ans) le 1er juillet 2018. À cette date, le taux offert était de 0,734% et elle a payé la valeur nominale de l'OAT, soit 100 € (pour l'exemple), car elle l'a achetée directement auprès du Trésor français.


Aujourd'hui (13 juillet 2023), 5 ans se sont écoulés, et il reste encore 5 ans jusqu'à l'échéance de l'OAT 10 ans. Sur le marché actuel, un produit similaire serait une OAT à 5 ans, qui offre désormais un taux de rendement de 2,9659%. La valeur de l'OAT 10 ans achetée en 2018 devrait s'ajuster pour refléter le taux de rendement actuel. Cela revient à résoudre le problème suivant :

Date de valeur

2018

2023

Prix OAT 10 ans acheté en 2018

100 €

?

Coupon payé

0,734 €

0,734 €

Taux d'intérêt pratiqué par le marché à la date de valeur

0,734 %

2,9659 %

La solution consiste à diviser 0,734 € par 2,9659%. Cela nous donne un prix de 24,748€ pour l'OAT 10 ans datant de 2018, ce qui représente une décote de 75%. Personne ne panique encore, car les règles comptables et la régulation actuelle permettent aux banques de ne pas refléter les conditions du marché sur certains actifs de leurs bilans (ce qu'on appelle le "mark-to-market"). En conséquence, cela explique pourquoi le price-to-book ratio (ratio capitalisation boursière sur les fonds propres) de la plupart des banques françaises est inférieur à 1, indiquant que la valeur boursière de la banque est inférieure à la valeur comptable de ses fonds propres : cela indique que les marchés sont conscients de ce risque.



Il existe un adage amusant en finance qui sert de "règle de trois" pour élaborer une stratégie : y a-t-il plus d'argent que d'idiots, ou plus d'idiots que d'argent ? Devinez dans quelle situation nous nous trouvons actuellement ?

 

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En savoir plus sur l'auteur de l'article : Hei Hang.


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