Transport et inflation
Dans un article précédent sur l’indice des prix à la consommation de juillet aux Etats-Unis, nous avons mis en lumière plusieurs composantes qui suggèrent une hausse persistante de l’inflation. Une d’entre elles est les services liés au transport qui voient de nouvelles disruptions.

Résumé de l'article
La vénérable entreprise de transport par camion Yellow a déposé le bilan en août après des années de difficultés financières et les problèmes récents liés aux coûts de financement et à la gestion du personnel.
Ceci met une pression baissière sur la capacité du secteur alors que la demande semble repartir à la hausse, alimentée par le phénomène de rapatriement des industries manufacturières sur le sol nord-américain.
Les tarifs de transports sont pour l’instant maintenus grâce à la capacité accumulée suite à la pandémie du Covid mais le spécialiste des données du secteur FreightWaves pense que nous sommes au début d’un cycle de purge des opérateurs non-performants.
La pression à la hausse des tarifs pourrait venir des récentes avancées sociales obtenues par les conducteurs d’UPS et qui risquent de créer un précédent.
En plus de ces phénomènes de fonds, on a une sécheresse au Panama et qui a réduit la capacité de passage du canal de même nom.
Il y a d’ores et déjà 200 bateaux en attente de passage de part et d’autre du canal avec comme possibilités soit de payer un tarif plus élevé, soit de se trouver une autre route, soit d’attendre.
Encore un impondérable qui ne facilite pas la tâche de la Réserve fédérale américaine dans sa lutte contre l’inflation.
Le péril Yellow
Le 6 août 2023, l’entreprise américaine de transport par camions Yellow a déposé le bilan. C’est la conséquence des années de difficulté financière et de dettes, dernièrement exacerbées par la pandémie du Covid, la hausse du coût de financement et des demandes de revalorisation salariales par les syndicats. L’entreprise avait 94 années d’existence et avait 30 000 employés.
On observe d’ores et déjà le phénomène de "destruction créative" théorisée par Schumpeter puisque les concurrents de Yellow sont déjà en train de se battre pour acquérir les biens mis en liquidation.
Le plus intéressant est que la disparition de Yellow correspond logiquement à une baisse de l’offre en fret alors que la demande a été en hausse, ce qui est inédite pour un mois de juillet habituellement calme, rapporte le PDG FreightWaves Craig Fuller, la plateforme phare sur l’industrie du fret.

Pour l’instant, l’industrie bénéficie encore de l’excès de capacité accumulée durant le Covid, comme semble indiquer un faible taux de rejet des offres par les camionneurs (3,5% à 3,6% alors que le bas atteint en mai a été de 2,5%). Ceci participe au maintien des tarifs de transports dans des niveaux actuels.
En outre, Fuller indique que le secteur est peut-être au début d’un cycle de purge qui va éliminer les firmes non performantes et qui risquent de pas pouvoir s’en sortir grâce à une hypothétique hausse des tarifs. Ce qui risquerait de mettre une pression baissière sur la capacité dans un futur plus ou moins proche.
Parallèlement à ces phénomènes de cycle court, Fuller a mentionné le phénomène de "nearshoring", c’est-à-dire un rapatriement de l’industrie manufacturière sur le continent nord-américain. La série d’accidents de train aux Etats-Unis que l’on a pu voir dans les médias en est un signe : l’utilisation a soudainement augmenté sans que l’infrastructure ait pu suivre par manque d’investissement et d’entretien des décennies durant. Voilà de quoi encore augmenté la pression des tarifs à la hausse dans le secteur.
Enfin, rappelons ici la hausse salariale obtenues par les conducteurs d’UPS qui risque de créer un précédent pour toute l’industrie… Et en contribuer à une hausse générale des coûts de transports.
La cale sèche
On se rappelle de l’accident du Canal de Suez survenu en mars 2021, quand le navire "Ever Given" s’était échoué en travers dans le canal de Suez, créant un bouchon monstrueux à l’embouchure de la Mer Rouge. On constate maintenant un assèchement du canal de Panama à cause de précipitations insuffisantes. Le niveau du canal est insuffisant pour servir tous les bateaux présents.
A l’heure actuelle, il y a 200 bateaux qui attendent des deux côtés du canal dont certains ont déjà attendu 2 semaines. La capacité journalière est de 32 passages contre 36 en temps normal. Ceux qui ont réservé leurs passages une année à l’avance peuvent utiliser le canal alors que ceux qui viennent spontanément doivent payer plusieurs fois le tarif habituel ou se trouver une autre voie.

Source : https://twitter.com/Rainmaker1973/status/1693193957306466632?s=20
A l’instar des phénomènes climatiques ou biologiques impactant l’agriculture (comme l’on a vu avec le chocolat, le jus d’orange), ce genre d’évènements imprévus disrupte une machine trop bien huilée qui a du mal à supporter les impondérables. La machine n’est pas arrêtée mais ralentie, mais tout ceci participe à la hausse des coûts et des prix payés par les consommateurs finaux… Et donc à la hausse de l’inflation et/ou la baisse des marges des entreprises et/ou donc à menacer les emplois.
Conclusion
Loin de vouloir prédire l’avenir, on constate qu’il y a peu (pas) de nouvelles et de faits qui indiquent à une baisse de l’inflation liée aux services des transports. Allié à cela, le procès-verbal de la dernière réunion de la Réserve fédérale américaine indique que l’inflation est toujours au centre de leurs préoccupations et qu’un nouveau resserrement n’était pas à exclure. Les courbes des différents indices boursiers apparaissent alors bien optimistes et portées par on ne sait quelle magie. Prudence…
Cet article ne constitue pas à une quelconque recommandation à un investissement.

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